Collection d’encens en bâtons « Domus » : les plantes sacrées des maisons romaines

Pour cette rentrée 2023, l’idée m’est venue de créer et proposer une collection d’encens historiques à visée pédagogique pour découvrir ou redécouvrir les plantes sacrées et préférées de l’Antiquité ainsi que le sens que cela représentait pour chacune d’entre elles.

Elle est à visée pédagogique, ce qui veut dire qu’elle est d’abord là pour enseigner, mais sa vocation n’est pas de rester dans les salles de classe ou les ateliers du musée ou du parc archéologique : partout où vous voulez l’apprendre vous-mêmes, l’enseigner aux autres ou offrir un parfum romain à un lieu spécifique.

En réalité, les plantes de l’Antiquité sont très nombreuses et malgré des plantes de même espèce et très reconnaissables, on peut être surpris par leur variété. C’est surtout vrai des plantes grecques dont les variétés de thym, de menthe ou d’origan, sauvages et issues des montagnes, sont beaucoup plus racées. Il serait d’ailleurs passionnant de travailler avec elles et d’en partager la connaissance, malheureusement, elles n’existent pas en huiles essentielles – très développées en Europe occidentale mais pas ailleurs où c’est l’emploi de la plante brute qui domine – et globalement, elles nous sont culturellement étrangères, malgré leur cousinage avec des espèces que nous connaissons mieux.

Alors, oui, contrairement à d’habitude, j’ai fait le choix des huiles essentielles, mais uniquement pour compenser la perte due à la présence obligatoire de bois neutre pour créer un bâton. Le reste, c’est la plante brute. Mais si vous deviez brûler du romarin sans bâton, ce serait la plante pure et donc un parfum plus intense : avec l’huile essentielle, je compense ce manque de façon complètement naturelle.

La collection s’appelle « Domus » parce qu’elle vous fait entrer dans une maison romaine. En effet, les plantes choisies sont celles de la culture romaine qui nous est proche, et dont le Sud de la France conserve encore dans son patrimoine culinaire les plantes à parfum aimées par les Romains. Pour autant, l’usage n’était pas forcément le même, et d’une manière générale, nous avons plus utilisé les plantes à parfums de la culture romaine de façon alimentaire qu’ils ne le faisaient eux-mêmes.

Dans une société industrielle, il est difficile de se représenter la place que pouvaient avoir les végétaux dans une société traditionnelle dont l’environnement proche constitue l’essentiel de ses ressources. Pour autant, c’est la situation la plus représentée dans le monde : plantes, minéraux, animaux, investis de pouvoirs ou vertus spéciaux au gré de cultures particulières, sont porteurs de sens et d’émotions variés selon le lieu, l’histoire, les croyances et les usages.

C’était aussi comme ça pour les Anciens. Et bien que certaines croyances et usages aient complètement disparu, ils ont fait partie de l’histoire de notre civilisation.

Ainsi, dans la culture gallo-romaine, la plante sacrée était plus généralement une plante aromatique à feuillage persistant par sa façon de résister au froid et au passage des saisons. A l’inverse des plantes caduques qui perdaient leur feuillage en automne, les plantes à feuillage persistant évoquaient l’immortalité, et ce faisant, les dieux, seuls immortels dans les conceptions anciennes.

Une plante sacrée était donc plus souvent une plante qui semblait ne jamais mourir, et les jardins romains étaient principalement composés d’espèces à feuillage persistant, plutôt semi-alimentaires et très aromatiques. La plante sacrée de l’Antiquité réunissait ainsi le plus souvent ces 3 qualifiés particulières.

J’ai choisi l’encens en bâton artisanal car il est très facile d’utilisation et permet ainsi facilement la rencontre avec l’expérience de fumigation pour laquelle nous avons souvent moins de motivation que les Anciens, y associant moins de vertus médicinales et sacrées.

– Le bâton est fait à la main par mes soins depuis une formulation personnelle décidée pour ce projet et sa composition est à la fois 100% artisanale et 100% naturelle.

– La boîte est fournie avec une notice où sont données quelques informations sur la façon dont les Anciens considéraient la plante et comment ils l’employaient sous forme de fumée odorante, mais exclut l’explication de son utilisation orale – puisque ce n’est pas l’expérience que vous en ferez avec ce produit.

– En revanche, vous pouvez les employer pour créer une atmosphère, vous figurer l’ambiance des maisons de l’Antiquité, l’odeur des autels, des carrefours, des mariages, etc…

_Venez ainsi découvrir les façons anciennes de considérer et d’utiliser : le cyprès, le laurier, la myrte, l’origan et le romarin sur la boutique Etsy du Labo de Cléopâtre !

Cet article et photos sont la propriété du site Le labo de Cléopâtre. Il est interdit de les reproduire sans l’autorisation de leur auteur.

DIY : Nettoyant universel d’inspiration antique

L’année dernière à la même date sortait officiellement mon livre Fabriquez vos soins naturels de l’Antiquité, auquel vous avez vraiment fait bon accueil, et je vous en remercie. Les livres ouvrent souvent des perspectives pour s’enrichir, voir les choses autrement, ou – comme dans le cadre de mon ouvrage – retrouver un patrimoine cosmétique simple et naturel dont nous avons actuellement plus que besoin.

Pour ma part, mes recherches ont changé ma façon de concevoir les cosmétiques, les parfums, de par le fait que je les travaille sur bases traditionnelles et oubliées dans nos sociétés, mais aussi parce que hypersensible, je fais intolérance à de plus en plus d’ingrédients cosmétiques et de parfums chimiques.

Pour fêter l’anniversaire de mon ouvrage, j’ai décidé d’offrir à mon lectorat une base de recettes de nettoyant universel sur la base de ce qu’utilisaient les Anciens – et que les sociétés traditionnelles conservent également : un fruit oléagineux à coque, une argile, et une plante à parfum. Et c’est tout ! Un produit basique et 100% naturel dont la formule très simple, très douce et efficace peut se réaliser partout, pour très peu d’argent, et peut se conserver longtemps.

– Équipement : bol, cuillère à café, boîte cosmétique – si vous voulez conserver ce produit

– Réalisation : 2 à 3 minutes

– Temps d’application : 1 à 2 minutes

– Conservation : non, cosmétique frais si mouillé mais conservation de plusieurs mois si non mouillé.

Recette végane

– Ingrédients : 2 c.à c d’amande en poudre, 1 c. à c de kaolin en poudre, 1 c. à c d’iris en poudre, un peu d’huile d’amande ou d’olive, eau.

– Dans votre bol, mélangez la poudre d’amande, le kaolin et l’iris. Pour lier le tout, mettre quelques gouttes d’huile de votre choix qui vous permettront d’obtenir une pâte grossière. Ajoutez quelques gouttes d’eau avant de nettoyer votre visage en de petits mouvements circulaires. Rincez abondamment quand vous avez massé toutes les zones de votre visage – ce nettoyant s’utilise également pour le corps.

Vous pouvez ensuite appliquer une crème, une huile, un beurre végétal ou rien du tout si vous avez la peau qui regraisse vite. Vous pouvez aussi entreprendre un soin du visage, rendu favorable par la douce exfoliation et la qualité purifiante du kaolin. Enfin, l’iris – qui servait de nettoyant autant que de parfum – vous permet de garder une légère odeur sur la peau.

Ce nettoyant universel basique combine des ingrédients utilisés dans l’Antiquité pour nettoyer le visage et le corps, comme vous avez pu le lire dans mon livre : poudre d’amande, iris, kaolin. Dans le livre, les recettes des médecins ou botanistes les proposent seuls, mais le cosmétique de Cléopâtre – qui était aussi un nettoyant visage et corps très parfumé – consiste en le même genre de composition : un dessicant, une base végétale riche et des plantes à parfum. (Dans ce nettoyant royal, c’est la combinaison des plantes à parfum qui est très complexe, ce qui est normal pour le cosmétique d’une grande reine.)

Vous allez peut-être me dire que vous n’êtes pas Cléopâtre et que vous, vous êtes plus concernée par la culture africaine, par exemple.

Et bien, comme ma recette est conçue comme une base universelle, elle peut s’adapter à votre peau, votre ethnie, votre envie de découverte ou de voyage pour peu que vous respectiez la base des ingrédients : le fruit oléagineux à coque, l’argile, la plante à parfum.

Pour l’Africaine, j’ai donc formulé :

2 c. à c de poudre de coco, 1 c. à c de kaolin, 1 c. à c de souchet en poudre (Nagarmotha chez AZ, gowé au Mali), huile de coco (ou de votre choix)

Réalisez et employez la recette de la même manière que l’Européenne. )La légère odeur de souchet qui reste sur la peau est juste magnifique !).

Vous voulez formuler autrement que je ne l’ai fait ? Pas de problème ! Respectez la recette de base et faites la recette naturelle de votre terroir ou celle avec laquelle vous avez envie de voyager.

– Idée recette Maghreb

– 2 c. à c de poudre d’amande, 1 c. à c de rhassoul, 1 c. à c de poudre de rose. Huile d’olive ou d’argan, quelques gouttes d’eau de rose

– Idée recette Asie

– 2 c. à c de poudre d’amande amère, 1 c. à c de kaolin, 1 c. à c de poudre de santal. Huile de sésame ou huile au choix, etc.

Vous pouvez également adapter la recette en fonction de vos besoins : une argile verte pour les problèmes d’acné qui nécessitent une terre plus absorbante, des proportions qui changent selon votre qualité de peau – plus d’amande avec la peau sèche, etc.

Vous pouvez introduire des ingrédients plus surprenants dans nos sociétés mais tout à fait traditionnels ailleurs :

– des feuilles de henné – qui servent dans les soins de la peau pour leur vertu purifiante –

– du curcuma – très utilisé dans les cosmétiques en Inde où il a la vertu d’illuminer les peaux sombres (un grand classique du mariage indien !)

– les bois odorants peuvent donné une odeur magnifique : Hinoki, santal, cèdre, genèvriers…

– la fleur de lavande, rose, camomille – uniquement les fleurs parfumées inoffensives et auxquelles vous ne faites pas allergie, évidemment !

En revanche, n’utilisez ni épices ni résines. Privilégiez les ingrédients simples que vous connaissez, sur lesquels vous êtes renseignés – et que vous aimez, tout simplement !

Vous voulez adopter ce nettoyant ?

Vous pouvez en préparer d’avance et le conserver dans un pot cosmétique propre et hermétique. Étant auto-conservé, tant que vous n’y introduisez pas d’eau, il se conservera longtemps. Vous pouvez y mettre les gouttes d’huile, mais comptez qu’il se conservera peut-être moins longtemps à cause du rancissement possible. Pour le conserver plus longtemps, optez pour la poudre brute – sachant que l’amande est quand même un oléagineux et risque aussi le rancissement.

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Partagez le lien et n’oubliez pas l’auteure : Maud Kochanski-Lullien.

Vous n’avez toujours pas lu Fabriquez vos soins naturels de l’Antiquité, sorti chez Améthyste, des éditions Alliance Magique ?

Il est ici : https://www.alliance-magique.com/plantes-huiles-essentielles-et-cristaux/428-fabriquez-vos-soins-naturels-de-l-antiquite.html

Cet article, photos et recettes sont la propriété du site Le labo de Cléopâtre. Il est interdit de les reproduire sans l’autorisation de leur auteur.

Le jardin romain de Nîmes

Au musée de la Romanité de Nîmes a été aménagé un jardin où ont été concentrées les espèces employées dans l’Antiquité. Une occasion pour moi de rencontrer ma palette de végétaux vivante, dans le plein épanouissement de ses parfums et de ses couleurs…

Étant allée à Nîmes pour découvrir son patrimoine antique que je savais considérable et unique en France, je dois dire que je n’ai pas été déçue. De la Maison Carrée aux Arènes – très bien conservées -, en passant par la Tour Magne, c’est un belle concentration de vestiges uniques, que j’ai ainsi pu découvrir.

Mais ce qui m’a donné le plus de plaisir, je dois bien l’avouer, c’est que le Musée de la Romanité avait aménagé un jardin organisé de façon thématique et chronologique autour des espèces utilisées dans l’Antiquité par les Gallo-romains.

Que vous ayez acheté certains produits de la boutique ou que vous ayez tenté une recette de mon livre Fabriquez vos soins naturels de l’Antiquité, vous avez peut-être remarqué que je travaille avec une palette de végétaux à la fois restreinte – par rapport à celle d’aujourd’hui – et plus ouverte.

Restreinte parce que dans l’Antiquité, on ne connaissait pas la réelle vastitude du monde, et même si on pouvait l’envisager, on n’allait malgré tout pas très loin.

Aujourd’hui, à l’inverse, dans un monde devenu exploré et bien connu, où le commerce mondial s’est globalisé, les espèces utiles sont non seulement bien connues, mais font aussi l’objet de transactions acharnées à des échelles industrielles.

Une situation de fausse abondance dans laquelle la quantité prodigieuse d’échanges restreint le choix autant que la connaissance. Car au final, seules quelques espèces « star » sont connues et sur-exploitées, d’autres, plus ordinaires ou mésestimées vont se retrouver négligées ou ignorées par manque de prestige ou de visibilité, et surtout parce qu’elles n’ont pas su faire rêver.

Parcourez avec moi ce jardin thématique bien pensé, qui a l’avantage d’être le pendant chronologique et rare des jardins de simples de certaines églises de France – devenus courants dans les communes, mais qui, bien bien que pédagogiques et passionnants, sont toujours plus inspirés par le capitulaire de Villis et Hildegarde de Bingen que par Diocoride, Pline ou Varron.

Dans l’Antiquité, comme dans beaucoup de sociétés traditionnelles, les plantes locales et leurs usages étaient étroitement mêlés à la mythologie et au sacré.

L’achillée millefeuille porte le nom du héros Achille pour avoir soigné son talon blessé. Un don de la compassion d’Aphrodite.

Le figuier, dont les racines arrêtèrent la barque qui entraînait Romulus et Rémus nouveaux-nés à une mort certaine.

L’olivier d’Athéna dont elle fit cadeau aux Athéniens et qui lui valut d’être patronne de la ville grecque.

La vigne, née des larmes de Dionysos et du sang d’Ampélos. son amant mortel tué par un taureau.

Le pin, né du sang d’Atys, que la déesse Cybèle avait rendu fou en voyant qu’il lui préférait une autre.

Le laurier, issu de la nymphe Daphné, changée en arbre par échapper à Apollon.

Le myrte, qui avait caché la nudité d’Aphrodite lors de sa naissance et qui devint une de ses plantes consacrées, symbole de l’amour durable.

Le romarin, l’encens des pauvres, mais d’abord des premiers Romains et qu’on consacrait préférablement aux lares, génies très nombreux de religion romaine.

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La complexe histoire du baume

L’image que nous nous faisons du baume est celle d’un remède externe agissant pour nous soigner, parfois, jusqu’en interne. Nous sont d’ailleurs proposés à la vente nombre de baumes cicatrisants, réconfortants, baumes à lèvres qui promettent de nous soigner tout en nous soulageant. Nous avons tellement le sentiment de comprendre ce terme qu’il ne nous est peut-être pas venu à l’esprit de rechercher sa définition dans le dictionnaire.

A l’idée de baume, cependant, sont associés tout un tas de notions interdépendantes bien qu’indirectement, et qui ont la particularité rare d’englober le matériel et le spirituel, le propre et le figuré. Si le baume évoque le soin, le soulagement, la douceur, il évoque aussi le parfum, notamment dans l’adjectif « balsamique »- évoquant directement l’odeur un peu résineuse – ou le verbe « embaumer », au sens de sentir bon.

C’est d’ailleurs son sens premier. Dans le très bel ouvrage consacré aux végétaux dans les Ecritures Saintes, Dans le jardin de la Bible, on apprend que le mot baume dérive d’un mot hébreu bésem, qui signifie « épice » ou « parfum ».

Mais « embaumer », c’est aussi l’acte de conservation du corps d’un cadavre, dont la technique était courante dans l’Antiquité, et qui se faisait avec des aromates et des résines, autrement dit avec des matières naturelles parfumées qui font que 3000 ou 4000 ans après, quand un archéologue découvre une momie et qu’un scientifique l’examine après lui avoir retiré ses bandelettes, les odeurs caractéristiques d’asphalte et de fénugrec lui parviennent encore.

Mais le baume, en réalité, c’est avant tout une résine, issue d’un commiphora, résineux dont fait partie l’arbre à myrrhe. Considéré comme poussant à l’état sauvage dans le sud de l’Arabie et le Nord-est de l’Afrique, il fut cultivé autrefois en Israël, à Giléad où on essaie à nouveau de l’implanter après sa quasi complète disparition, au moins du commerce ordinaire. Tombé en disgrâce, le baume cesse d’être cultivé en Israël avec la venue du christianisme, quand les Romains en faisaient au contraire une grande consommation.

Pourtant, c’était une résine précieuse, et nombre de recettes d’encens, de parfums ou de remèdes médicinaux anciens en contiennent, ce qui les rend aujourd’hui incomplètes lorsqu’on veut les reconstituer. Plus encore, la quête du baume paraît une sorte de Graal, d’absolu de la résine à ceux qui sont curieux d’un parfum offert par les arbres, surtout d’un qui était particulièrement estimé dans l’Antiquité.

« J’entre dans mon jardin, ma soeur, ô fiancée, je récolte ma myrrhe et mon baume. » Cantique des cantiques.

Théophraste dit de son parfum : « On en recueille environ le contenu d’une coquille par personne et par jour; son parfum, au contraire, est remarquable et si fort qu’une petite quantité suffit à le répandre sur un vaste territoire. Mais le commerce n’apporte pas ici du baume pur : le produit collecté a été dilué plusieurs fois. » Livre IX.

Mais comme souvent dans l’Antiquité, ce qui faisait office d’excellent parfum était aussi – et peut-être avant tout – considéré comme médicament, ce pourquoi nous conservons d’ailleurs, associée à l’idée de baume, celle d’un cicatrisant, d’un médicament soulageant les blessures.

De fait, ce qui sur une momie éloigne les bactéries et permet au corps mort de conserver son intégrité devait aussi fonctionner sur le corps vivant en créant un isolant, un rempart efficace contre les agents pathogènes et la plaie par laquelle ils pourraient facilement entrer. Plus personne aujourd’hui ne mettrait de la résine sur une plaie,sans compter qu’il faudrait certainement l’amener à une température pas déterminable à l’heure actuelle en son absence mais qui serait certainement douloureuse pour la peau par rapport aux moyens modernes qui permettent des soins dans la douceur.

L’idée de baume, pourtant, est restée. Spiritualisée dès la Bible, elle est associée au soulagement de la tristesse ou même du péché : « N’y a-t-il point de baume en Galaad ? N’y a-t-il point de médecin ? Pourquoi la guérison de la fille de mon peuple ne s’opère-t-elle pas ?« , demande Jérémie, inquiet des péchés répétés du peuple d’israël.

Aujourd’hui, sa réputation millénaire, son importance dans l’imaginaire collectif est si grand que si nous recherchons du baume de Giléad ou de Galaad, on pourra nous proposer à la  vente, plutôt que la résine disparue, du bourgeon de peuplier, un morceau de sapin baumier, et une autre sorte de plante de jardin portant ce nom. Déjà devenu très rare à la Renaissance, l’Eglise catholique avait accepté de le remplacer par le baume de Tolu, une résine amérindienne que la découverte du Nouveau Monde avait permis d’utiliser pour recréer l’huile sainte d’onction des Rois dont la recette remontait, évidemment, à l’époque biblique et nécessitait, bien sûr, le précieux ingrédient disparu.

Adresse de la photo d’un baumier d’Arabie par Muhammad Al Shanfari )

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Faire un parfum huileux (DIY)

Dans l’Antiquité, le parfum n’était pas à base d’alcool et la distillation n’était pas non plus inventée. Certains chercheurs ont malgré tout évoqué une méthode compliquée utilisant un textile au-dessus d’une marmite pleine de végétaux chauffés pour en extraire les huiles essentielles en guise de pré-distillation. Bien que certainement efficace puisque les odeurs se fixent effectivement bien dans les fibres, ce devait malgré tout être une technique aussi rare que coûteuse et longue.

Les parfums antiques étaient généralement faits :

  • de fleurs fraîches via les couronnes
  • de matières odorantes brûlées
  • de poudres de végétaux odorants
  • d’huiles dans lesquelles on a pratiqué l’enfleurage à chaud ou à froid

Aujourd’hui, c’est cette dernière technique que je vais vous présenter et vous permettre de reproduire – non pas avec de l’enfleurage à froid dans un premier temps parce que cela concerne des matériaux fragiles, coûteux, et des procédés salissants et contraignants – mais avec un enfleurage à chaud en utilisant des matières solides et résistantes.

Pour la recette suivante, je vous laisse le choix entre le parfum de myrrhe ou de cannelle, les deux étant appréciés dans l’Antiquité et étant tout aussi faciles à obtenir car demandant les mêmes techniques. Les seules différences seront sur l’odeur, votre investissement et vos goûts personnels, et si vous avez de la myrrhe à disposition, de la cannelle, etc. Prenez aussi en considération votre sensibilité : même si ses huiles essentielles ne sont pas très concentrées dans cette recette, la cannelle est très allergisante.

Bien que la technique soit réalisable avec de l’oliban et une autre épice que la cannelle, je ne vous les propose pas car ces parfums ne sont pas cités dans l’Antiquité dans le cadre des parfums huileux.

  • Matériel
  • Huile d’olive
  • Larmes de myrrhe ou bâtons de cannelle
  • Sel
  • Résine quelconque
  • Auto-cuiseur ou grosse casserole et panier à vapeur
  • Bol
  • Film alimentaire
  • Flacon 15 à 20 ml
  • Mini entonnoirFullSizeRender (8)
  • Marche à suivre

Dans un petit bol, placez de la résine de myrrhe ou des bâtons de cannelle de façon à recouvrir le fond. Recouvrez d’huile d’olive sans aller beaucoup plus haut que le bord des ingrédients. Rendez hermétique votre bol grâce au film alimentaire.

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Remplir l’auto-cuiseur d’eau, allumez-le et mettez le bol dans le panier à vapeur. Ajoutez le couvercle. Laissez les matières premières libérer leurs huiles essentielles ainsi dans le corps gras pendant plusieurs heures tout en vérifiant régulièrement la présence d’eau dans la casserole ou d’auto-cuiseur. Quand il ne reste presque plus d’eau, arrêtez le feu et laissez refroidir. Une fois l’ensemble refroidi, vous pouvez déjà retirer le film et sentir votre produit pour l’évaluer.

Vous pouvez ensuite remettre sur le feu de la même manière en rajoutant de nouvelles matières premières pour charger encore plus l’huile en parfum jusqu’à saturation. Vous pouvez améliorer ainsi votre produit pendant plusieurs jours afin d’en rendre le parfum plus fort, tout en laissant les épices ou les résines dans l’huile entre les phases de chauffe.

Une fois satisfait du résultat, il ne vous reste plus qu’à retirer les résines ou les épices en les pressant un peu pour récupérer toute l’huile, puis verser le parfum huileux dans le flacon, à travers un mini entonnoir. Ajouter une résine au fond du flacon pour la conservation du parfum, une pincée de sel pour la conservation de l’huile et gardez votre produit à l’abri de la lumière. IMG_5982

Ajoutez une étiquette avec la date. Votre parfum huileux est un produit qui va évoluer, notamment en senteur, contrairement aux parfums du commerce. N’hésitez pas à le porter, à le tester, à vous émerveiller de son évolution : vous serez surpris du voyage !

NB : Cette technique vaut pour quelques résines et quelques épices mais ne vaut pas pour d’autres ou pour d’autres végétaux vivants comme les fleurs qui ne supportent pas la chauffe, qui sont muettes de parfum ou qui modifient leur parfum en chauffant.

Cet article et ces photos sont la propriété du site Le labo de Cléopâtre. Il est interdit de les reproduire sans l’autorisation de leur auteur.